Le sport sur ordonnance, ça marche à Vienne

C’est un enjeu de santé publique : il nous faut, dans nos vies de plus en plus sédentaires, avoir une activité physique quotidienne. Pourtant, selon l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), 95% de la population française adulte est exposée à un risque de détérioration de la santé par manque d’activité physique ou un temps trop long passé assis.

Les habitants de Vienne, en Isère, n’échappent malheureusement pas à ce constat alarmant. Plus grave encore, une enquête de grande ampleur commandée par l’Agglomération Vienne Condrieu – « diagnostic local de santé 2019 / 2021 » – a révélé un taux d’obésité et de diabète supérieur à la moyenne régionale.

L’enquête sanitaire à l’échelle de l’agglo, un déclic pour les élus de Vienne

« Tout est parti de là », se souvient Jacques Boyer, conseiller municipal délégué à la santé et médecin hospitalier retraité. C’est en effet à ce moment-là que l’idée de sport sur ordonnance, déjà développé dans certains pays d’Europe comme en Allemagne, en Italie ou au Royaume-Uni est entré dans les discussions municipales à Vienne. « L’État avait déjà mis en place des politiques ce sens, avec notamment la loi de modernisation de notre système de santé ayant introduit en 2016 la possibilité, pour le médecin traitant, de prescrire une activité physique aux personnes souffrant d’une affection de longue durée, et en 2022 une loi visant à démocratiser le sport en France« , avance aussi Annie Dutron, 5^e adjointe en charge des sports.

Une commission transpartisane s’est alors créée au sein de la municipalité de Vienne et six élus ont planché sur ce qui était encore à l’époque une idée de projet. En mars 2023, le dispositif « Vienne en forme » voyait le jour et une tournée des médecins de la ville était organisée afin de leur expliquer le dispositif.

Un accompagnement vers une activité physique adaptée

Concrètement, le dispositif « Vienne en forme » permet à des habitants atteints de diabète de type 2 ou d’obésité de bénéficier, sur ordonnance de leur médecin (généraliste ou spécialisé), d’un accompagnement personnalisé pour adapter leurs pratiques sportives à leurs pathologies, leurs capacités physiques et leurs risques médicaux. « Une fois la prescription médicale donnée au patient, je le rencontre et réalise un bilan de son état de santé physique (mobilité, force musculaire) et de sa motivation psychologique », précise Sophie Castano, coordinatrice en activité physique adaptée embauchée par la commune. Bilan qui sera renouvelé à 3 puis à 6 mois.

Le patient débute ensuite son activité physique à travers des cours dispensés par Sophie toute la semaine moyennant un paiement de 8€ par mois (certaines mutuelles le prenant en charge). Au programme : basket, stretching, équilibre, badminton, handball, boxe, rugby, gym douce, volley, pétéca, renforcement musculaire, coordination… « Grâce à ce dispositif, j’ai retrouvé une forme que je n’avais plus depuis longtemps« , nous confie Catherine, 68 ans. Martine, elle, a chaque semaine hâte de raconter à sa petite-fille le sport testé avec son groupe dans le cadre de « Vienne en forme ».

Chaque semaine durant six mois (durée maximale de l’ordonnance), le patient va suivre deux cours par semaine – chaque cours durant une heure – dispensés par la coordinatrice-éducatrice en sport adapté, lui permettant de reprendre une activité physique, à son rythme et dans la bienveillance. « Les bienfaits sont nombreux : diminution du risque d’accidents cardiaques, d’accidents vasculaires cérébraux, du stress et du risque de cancer, amélioration du moral, de la confiance en soi, de la respiration et du sommeil, baisse du taux de sucre et de graisse dans le sang, augmentation de l’espérance de vie… », martèle Sophie Castano, que nous rencontrons en pleine séance de badminton avec un groupe de cinq personnes.

Un dispositif victime de son succès

L’idée est de redonner confiance et envie aux patients afin qu’ils continuent, après leur passage au sein du dispositif « Vienne en forme », la pratique d’une activité physique en autonomie ou en club / association.

« Le dispositif marche si bien que nous avons des patients en attente d’intégrer un groupe. Il va nous falloir recruter de nouveaux coordinateurs et trouver des moyens d’accompagner du mieux possible les patients vers une pratique physique en autonomie après leur passage auprès de Sophie. On se rend en effet compte qu’une fois livrés à eux-mêmes, certains bénéficiaires sont moins motivés et s’éloignent de nouveau du sport. » confie l’adjointe aux sports. Une problématique qui rejoint ce que nous a glissé Catherine après la séance de badminton : « je n’arrive pas à me motiver seule chez moi, j’ai besoin qu’on me bouscule un peu et que l’on me cadre, d’où la grande utilité de ce sport sur ordonnance ».

Un dispositif plein d’espoir donc, avec encore une belle marge de progression pour accueillir plus de patients, l’ouvrir à d’autres pathologies et trouver des moyens pour suivre les bénéficiaires une fois l’arrêt de leur ordonnance.

Cette immersion complète au sein du dispositif « Vienne en forme » nous a permis de confirmer qu’il mérite amplement le label « truc qui marche » ! Avis maintenant aux élus de France, vos confrères de Vienne seront heureux de vous donner des conseils afin de le dupliquer dans vos communes.

Par Théo