EBE semur en auxois

Semur-en-Auxois

Dans ce territoire, le chômage longue durée va disparaitre

La commune de Semur-en-Auxois se saisit à bras le corps du chômage de longue durée et redouble d’efforts au service de l’emploi et des habitants.

  • Créée en 2023 par la ville de Semur-en-Auxois, l’Entreprise à But d’Emploi fonctionne comme une vraie entreprise avec un directeur, des salariés et des clients avec des objectifs de résultat. Son statut est associatif, selon la loi 1901.
  • 10 personnes travaillent dans l’EBE, toutes éloignées de l’emploi (plus de 12 mois de chômage) avant de la rejoindre.
  • Sur les 215 personnes en chômage longue durée sur le territoire au lancement de l’initiative, 30 ont été placées via l’EBE ou dans des emplois de droit commun

Lorsque l’on est éloigné de l’emploi depuis longtemps, il est souvent bien difficile de retrouver un employeur par manque de confiance en soi et par défiance de certains patrons d’embaucher une personne ayant « décroché » à un moment de sa vie. La commune de Semur-en-Auxois, en Côte-d’Or, se saisit à bras le corps de cette situation et redouble d’efforts au service de l’emploi et des habitants. Découverte de l’Entreprise à But d’Emploi (EBE) qui lutte sur ce territoire contre le chômage longue durée.

Leur truc qui marche : l’Entreprise à But d’Emploi (EBE)

Nous rencontrons Niels, un Bourguignon d’adoption installé à Semur-en-Auxois depuis 2018, qui sillonne le monde dans le cadre de ses fonctions professionnelles pour lesquelles la création d’emploi est d’ailleurs l’un des piliers. « Je vais vous parler d’emploi. Ou plutôt de retour à l’emploi ». Quand on regarde de loin, Semur c’est 3 900 emplois (sur la base des fiches de paie émises) pour 4 200 habitants. Mais ces chiffres font oublier qu’il y a des personnes très éloignées du travail, dans des situations de grande misère, pour qui « au chômage » ou « au RSA » veut aussi dire « problèmes de santé », « dépression », « alcoolisme », « solitude », « misère ». 

Niels avait entendu parler du dispositif d’État « Territoire Zéro Chômeur longue durée ». Par « longue durée », entendre « plus de 12 mois ». Il se saisit du dossier et mène les démarches puis obtient la labélisation, qui lui permet de mettre en place une expérimentation de 3 ans et de réunir toutes les parties-prenantes (Préfecture, CAF, France Travail, Médecine du Travail, Centre d’Action Sociale…). Dans ce grand remue-ménage impulsé par Niels au niveau local, nous nous concentrons plus particulièrement sur un petit « truc qui marche » du dispositif : l’Entreprise à But d’Emploi. « C’est une sorte d’entreprise publique avec un statut d’association loi 1901 » explique Nicolas, son directeur.

La commune a identifié, en lien avec France Travail, 215 personnes en chômage longue durée à Semur-en-Auxois. La question, c’est pourquoi ces personnes restent éloignées de l’emploi… « En fait, on découvre des situations dramatiques. Des gens qui ne peuvent pas se déplacer : j’ai souvenir d’un monsieur qui était allé demander un prêt à sa banque pour faire le plein de sa voiture et aller démarcher des entreprises pour trouver un travail. Des problèmes de santé et de handicap : y’a toujours ceux qui ont bossé en usine, sur les chantiers… leur boîte ferme à 5-6 ans de la retraite, ils sont cassés de partout alors va retrouver un travail… Puis le dernier sujet, c’est le manque de compétences mises à jour : ici faut se dire que dans les années 60-70 le vendredi tu avais ton brevet, tu faisais la fête tout le weekend, le lundi tu embauchais en CDI à vie à l’usine, le mardi tu étais en grève comme tes collègues. »

L’EBE fonctionne donc comme une « vraie entreprise » 

En effet, à l’EBE il y a des salariés, une hiérarchie, des objectifs de chiffre d’affaires et trois activités principales.

1/ La conciergerie 

L’EBE propose des services aux entreprises du territoire comme la livraison de repas, des aides ponctuelles sur des missions physiques (nettoyage, transports, petits travaux…). C’est le cas de l’entreprise « Le Bahut », un tiers-lieu en occupation temporaire qui préfigure un immense projet immobilier, qui a un contrat de 100h / mois avec facturation au réel. Les salariés travaillent en ce moment sur la sécurisation du chantier avec des barricades, l’inventaire des meubles…

2/ Les transports

L’EBE a investi dans une navette avec régie publicitaire qui permet de faire du transport de personnes. C’est d’ailleurs grâce à cette navette que j’ai pu venir à Semur-en-Auxois depuis la gare de Montbard. Des habitants peuvent aussi commander la navette pour aller à un rendez-vous médical, faire leurs courses…

3/ La recyclerie 

Les salariés assurent la collecte du verre et des cartons des commerçants du centre-ville (4€ le ramassage pour un commerçant, 2 tournées / semaine, 12 commerçants contractualisés, 20 tonnes de déchets recyclables collectés par an). Ils ont une boutique du réemploi, située au Bahut, avec restauration et vente de meubles, d’objets… en vide-greniers et dépôt-vente. Ils vont également développer une activité électro-ménager d’occasion. Ils ont lancé une activité de réparation de vélos collectés auprès des habitants. Une partie sont donnés, d’autres revendus, et quelques-uns sont mis dans la ville en libre-service ! L’un des salariés, Dominique, développe un projet entrepreneurial : des petites boîtes en bois. Il a déjà un premier client « Les Pâtisseries de Ninon » qui y met chocolats et pâtisseries…

Mais alors comment ça fonctionne ? 

Les salariés de l’EBE sont payés au SMIC (1300 €). Ces salaires sont subventionnés à hauteur de 90-95% en partie via l’assurance chômage que les salariés toucheraient s’ils restaient chez eux, complétée par des aides de l’État, de la Région, du département. Pour Niels, « On parle d’un choix de société. Soit on laisse des gens déprimer chez eux, en les payant un peu pour ça quand même, puis ça coûte 40 milliards à l’État, soit on développe ce type d’initiatives pour pousser les gens à retrouver le chemin de l’emploi d’une manière ou d’une autre ». 

L’EBE a reçu énormément de candidatures mais certains profils étaient « trop qualifiés » et « très employables » dans des entreprises plus traditionnelles. Alors ces profils sont fléchés vers des entreprises du territoire qui recrutent. 30 personnes ont retrouvé un emploi comme ça. Pour les autres, ils intègrent l’EBE, qui compte 10 salariés actuellement, avec 80 volontaires en attente. Le but étant aussi pour les personnes de l’EBE de profiter de cette expérience pour ensuite la faire valoir auprès d’entreprises plus traditionnelles. En un an, le nombre de chômeurs longue durée a chuté de 10% grâce à l’EBE. Nous avons rencontré les salariés de l’EBE, ils sont fiers de ce qu’ils font et ils peuvent l’être.

Par Raphaël

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